
Face à la hausse du risque de retrait-gonflement des argiles, CCR développe un indicateur inédit pour mieux anticiper les effets de la sécheresse sur les bâtiments.

Sécheresse et retrait-gonflement des argiles : un risque croissant en France
Le retrait-gonflement des argiles (RGA) est une conséquence géotechnique majeure de la sécheresse. Il provoque des fissures et des déformations dans les bâtiments construits sur des sols argileux sensibles.
Ce phénomène, parfois appelé « sécheresse géotechnique », est devenu le deuxième risque naturel le plus indemnisé en France après les inondations, avec plus de 3 milliards d’euros de dommages estimés en 2022.
Pour mieux anticiper ce risque, CCR collabore avec Météo-France et le BRGM dans le cadre d’une recherche visant à développer un indicateur scientifique qui mesure la sévérité des sécheresses susceptibles de déclencher le RGA.
Pourquoi la sécheresse aggrave le retrait-gonflement des argiles ?
Le RGA touche les sols riches en minéraux argileux. Lors de périodes de sécheresse prolongée, ces sols se rétractent en perdant leur humidité. À leur réhydratation, ils regonflent, provoquant des mouvements de terrain qui déstabilisent les bâtiments.
Un phénomène difficile à cartographier
Les zones argileuses sont très hétérogènes. Pour mieux cibler les zones à risque, le projet combine bases géotechniques, données climatiques et sinistres assurés collectés par CCR.
Méthodologie : modéliser l’impact de la sécheresse sur le retrait-gonflement des argiles
Trois sources de données intégrées
- L’humidité des sols, modélisée par Météo-France avec le modèle ISBA
- Les cartes géologiques du BRGM, identifiant les sols argileux sensibles
- Les bases sinistres Cat Nat de la CCR
Création d’un indicateur de magnitude annuelle de sécheresse
Ce nouvel indicateur quantifie les anomalies négatives d’humidité sur une maille de 8 km, à l’échelle nationale. Il vise à identifier les zones où la sécheresse est susceptible de provoquer des mouvements de sols argileux

Magnitude de sécheresse pour les années 2000 à 2022.
Remarque : certaines sécheresses saisonnières (ex. printemps 2011) restent mal captées dans l’état actuel du modèle.
Sécheresse et retrait-gonflement des argiles : résultats de l’analyse 2000–2022
Années les plus marquantes
- 2003 : sinistralité estimée à 1,2 milliard d’euros
- 2018–2020 : succession d’épisodes secs
- 2022 : année record avec plus de 3 milliards d’euros de sinistres liés au RGA
Sécheresse future et retrait-gonflement des argiles : ce que disent les projections jusqu’en 2065
Le modèle ISBA a été utilisé pour simuler les sécheresses futures à partir de 6 modèles climatiques selon les scénarios RCP 4.5 (modéré) et RCP 8.5 (pessimiste).
Ce que montrent les résultats :
- Une intensification du risque RGA à partir des années 2030
- Des écarts importants entre les scénarios après 2045
- Une généralisation du risque à une large partie du territoire français sous RCP 8.5

75ème centile (égal au 3ème quartile) des magnitudes de sécheresse projetées jusqu’en 2065 par périodes de 20 ans
(2006-2025, 2026-2045, 2046-2065) pour les scénarios RCP 4.5 et RCP 8.5, pour différents modèles de climat.
Sécheresse et retrait-gonflement des argiles : vers un outil prédictif opérationnel
Prochaines étapes du projet CCR–Météo-France–BRGM
- Croisement de l’indicateur avec les cartes de susceptibilité BRGM
- Développement d’un indice annuel de potentiel de retrait
- Comparaison avec les sinistres historiques pour validation
- Intégration dans des modèles de prédiction assurantiels et territoriaux
Objectifs à terme
- Aider à prévoir les sinistres RGA à l’échelle communale
- Améliorer les plans de prévention et les normes de construction
- Informer les assureurs et collectivités locales sur l’évolution du risque
Crédits, sources et partenaires du projet sécheresse – RGA
Auteurs
- Sophie Barthélemy (CCR / Météo-France / BRGM)
- Jean-Philippe Naulin (CCR – Modélisation & Actuariat)
Partenaires
- Météo-France
- BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières)
- CCR
Source principale
- Barthélemy et al., Anticipation de l’évolution des phénomènes RGA sous l’effet du changement climatique,
- Rapport scientifique CCR 2024, pp. 10–13
Références complémentaires
- Noilhan & Mahfouf (1996) – Modèle ISBA
- Barthélemy et al. (2024), Nat. Hazards Earth Syst. Sci.
- CCR (2024), Les catastrophes naturelles en France – Bilan 1982–2023
Source et crédit photo :
- AFP : BRUNO FERRANDEZ / AFP
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